La sixième région

Presque unanimement reje tée par l’Afrique
lorsqu’elle avait été émise par le Sénégal en 2000, l’idée de faire
officiellement de la diaspora africaine la sixième région du
continent s’affirme de plus en plus et pourrait finir par s’imposer
dans les faits comme dans les esprits.

Cette conviction a été réaffirmée jeudi à Salvador de Bahia, au
Brésil, par le ministre d’Etat, ministre sénégalais des Affaires
étrangères, Cheikh Tidiane Gadio, au cours d’un entretien avec la
PANA, en marge des travaux de la deuxième Conférence d’intellectuels
d’Afrique et de la diaspora (CIAD II).

Prenant en marche le train de l’Union africaine (UA) alors en
constitution, le régime arrivé au pouvoir au Sénégal en 2000 avait
constaté que le mot “diaspora” était absent de l’Acte constitutif de
l’organisation et avait suggéré de combler cette lacune en en faisant
la sixième région du continent.

“Ce qui est amusant, c’est que le jour où le Sénégal a présenté le
projet d’amendement à l’Acte constitutif de l’UA pour que la diaspora
soit intégrée comme sixième région du continent, certains en avaient
ri et d’autres avaient trouvé que c’était une proposition bizarre”, a
rappelé M. Gadio.

Ils ne comprenaient pas que la diaspora puisse être considérée comme
une sixième région, mais aujourd’hui ce sont ceux qui s’étaient
opposés de façon véhémente à cette idée qui font le tour des pays de
la diaspora pour dire qu’ils ont proposé à l’UA l’adoption de l’idée
d’en faire la sixième région, ajoute-t-il sans vouloir citer de nom.

“Lorsqu’on m’a demandé ce que je pensais d’une telle attitude, j’ai
répondu que le Sénégal ne se lancerait jamais dans une guerre de
paternité”, dit-il, considérant que “c’est une très bonne chose que
les pays en question aient rallié la cause de la diaspora comme
sixième région”.

Notant que l’image écornée et tout à fait déséquilibrée que l’on
présente de la réalité de l’Afrique contribue à la démoralisation des
peuples d’origine africaine, il estime que si la diaspora est
intégrée comme sixième région, les pays du continent ne pourront qu’y
gagner.

En effet, il évoque cette diaspora qui a un immense potentiel
économique comme au Brésil, un immense potentiel intellectuel et
scientifique comme aux Etats-Unis et dans les Caraïbes et qui, si les
liaisons aériennes commerciales s’étendent entre les deux entités, se
sentira naturellement intégrée, créant notamment un important espace
économique.

“Si les millions d’Africains qui vivent en Europe, en Australie et
partout dans le monde acceptent de se considérer comme membres du
continent africain, quelle que soit leur localisation géographique,
apportent leur contribution, viennent donner des cours dans nos
universités et font des prestations dans nos hôpitaux, cela prendra
de la cohérence que de parler de sixième région et ce sera d’un
apport extraordinaire pour notre continent”, a ajouté M. Gadio.

En outre si cela se fait, le problème constitué par le démembrement
qui a eu lieu, c’est-à-dire la mutilation qui a fait qu’une partie de
l’Afrique a été déportée, s’en trouvera du coup résolu au triple
point de vue historique, psychologique et humain, estime encore le
ministre sénégalais.

“Donc aujourd’hui ce combat avance”, a-t-il affirmé, confiant avoir
entendu le président nigérian, Olusegun Obasanjo, alors président en
exercice de l’UA, dire devant l’intelligentsia africaine-américaine,
réunie à New York, qu’il a été proposé à l’organisation panafricaine
de faire de la diaspora la sixième région africaine.

Estimant qu’il s’agit aujourd’hui d’une idée assez acceptée, qui peut
même être considérée comme acquise, M. Gadio juge que malgré les
réticences du début des uns et des autres, avec ces CIAD qui se
multiplient et deviennent une tradition, on comprendra l’urgence
d’aller vers les grands ensembles comme les Etats-Unis d’Afrique.

Au fait, se demande-t-il enfin, pourquoi l’Afrique ne serait-elle pas
fière d’avoir des démembrements comme la Jamaïque, Trinidad et Tobago
et de fortes communautés nationales aux Etats-Unis, au Brésil et au
Canada qui la soutiennent comme la diaspora indienne en Grande-
Bretagne ou à Maurice soutient et appuie l’Inde pour faire avancer la
cause de ce pays?

La suggestion du Sénégal visait à ajouter la diaspora aux cinq
régions naturelles du continent que sont l’Afrique du Nord, l’Afrique
de l’Ouest, l’Afrique de l’Est, l’Afrique centrale et l’Afrique
australe.

Mais la résolution adoptée en fin de compte se contente d’inviter et
d’encourager “la pleine participation de la diaspora africaine à
l’édification de l’Union africaine en tant que composante importante”
du continent.

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